Alors que partout en Europe et en France les agriculteurs sont dans la rue pour faire savoir leur colère viscérale, le vice-président de la Commission européenne en charge du commerce, Valdis Dombrovskis, a réaffirmé hier matin la volonté ferme de ratifier l’accord commercial entre l’UE et le Mercosur.

Totale hérésie ! Afin de documenter concrètement l’impact de cet accord sur les filières agricoles, l’AGPM rend publique aujourd’hui une étude complète sur la réalité de cet accord concernant la culture du maïs.

Parmi les revendications majeures portées par nos agriculteurs, il en est une qui revient souvent : préserver la compétitivité des exploitations et mettre fin à toute concurrence déloyale. Si nous sommes ouverts aux échanges commerciaux, nous sommes farouchement opposés à la ratification de l’accord commercial entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil – Argentine – Paraguay – Uruguay).

A l’heure où l’Europe importe 25% de ses besoins en maïs de l’étranger, cet accord permettrait aux pays du Mercosur d’exporter sans droit de douane, tout produit de la filière maïs confondu (maïs grain, poulet, amidon, semoulerie, éthanol…), l’équivalent de 3,4Mt de maïs, à la sauce brésilienne, soit ¼ de la production annuelle française de maïs grain.

Or ce que nous apprend l’étude documentée par l’AGPM « Accord UE-Mercosur : impacts et propositions pour la filière maïs » travaillée durant plusieurs mois est édifiant : les investigations menées démontrent que le Brésil est le champion toute catégorie de la concurrence déloyale, avec un coût global de production inférieur près de 100€ la tonne de maïs par rapport à la France. Cet écart de compétitivité colossal est notamment dû aux :

• Produits phytosanitaires autorisés au Brésil et en Argentine pour les producteurs de maïs qui sont interdits en Europe pour 52 % d’entre eux et même 78% en France ;

• Surfaces d’exploitation de maïs au Brésil qui peuvent aller jusqu’à 500 000ha soit l’équivalent d’un département français contre environ 70ha pour une exploitation en moyenne en France.

Et ce n’est pas tout ! A cette insupportable situation de distorsion de concurrence s’ajoute l’impact environnemental de la production de maïs au Brésil. L’étude montre que la principale zone d’extension de la production de maïs concentrée sur le Cerrado, second plus grand écosystème d’Amérique du Sud après l’Amazonie, est responsable à elle seule de 15% de la déforestation de cette région.

Face à ces faits et alors que, selon les projections de la Commission européenne, le Brésil devrait voir ses surfaces de maïs augmenter de 3,8 millions d’hectares d’ici 2032, et peser encore plus sur les importations de l’UE, l’AGPM formule 4 propositions pour protéger les maïsiculteurs Français et européens et aligner la politique commerciale de l’UE sur les objectifs qu’elle affiche en matière de souveraineté et de durabilité :

• Modifier en profondeur le contenu de l’accord de libre-échange conclu entre l’UE et le Mercosur pour y inclure des « clauses miroir » ;
• Imposer des « mesures miroir » et la structuration de filières dédiées à l’exportation vers l’UE au sein des principaux pays exportateurs de maïs (Exemple de l’interdiction du bœuf aux hormones produit aux Etats-Unis et au Canada en vigueur depuis 1988) ;
• Ajouter le maïs et les zones de savane du Cerrado dans la liste des produits et des écosystèmes concernés par le règlement européen relatif à la lutte contre la déforestation importée ;
• Rénover le mécanisme de droits de douane relatif au maïs pour protéger efficacement les capacités de production européennes.

« L’étude que nous avons menée démontre très concrètement que la Commission européenne, en envisageant de ratifier cet accord, perd totalement la raison ! Sur ce sujet comme sur les autres, nous continuerons de refuser catégoriquement la menace que les injonctions contradictoires françaises et européennes font peser sur notre sécurité alimentaire et sur la pérennité de nos exploitations ! », déclare Franck Laborde, président de l’AGPM.

 

L’AGPM (Association Générale des Producteurs de Maïs) est une
association du réseau de la FNSEA représentant les intérêts des
producteurs français de maïs et de l’ensemble des filières maïs (grain,
fourrage, semence, doux et pop-corn).

 

 

La filière maïs

L’Union Européenne est le 1er importateur mondial de maïs devant la Chine

En 2022/2023, l’Union européenne est passée devant la Chine pour rede- venir le premier importateur mondial de maïs, avec 26 millions de tonnes importées. Avec un million d’hectares de maïs perdus au cours des vingt dernières années sur nos territoires européens, une tonne de maïs sur quatre consommée au sein de l’UE est désormais produite ailleurs dans le monde.

Face à cette dépendance accrue aux importations de maïs aux usages pourtant hautement stratégiques aux plans alimentaire et énergétique, la Commission européenne fait aujourd’hui un drôle de pari. Elle s’engage à durcir la règlementation qui s’impose aux agriculteurs européens quitte, à affaiblir leurs capacités de production… tout en multipliant les opportunités commerciales offertes à d’autres systèmes de production de maïs à travers le monde, qui ne respectent pas les normes de production environnementales et sanitaires européennes !

 

Le drôle de pari de la Commission européenne : le Green Deal et l’accord de libre-échange avec le Mercosur

C’est le cas, par exemple, des exploitations de maïs du Mato Grosso, une région au centre-ouest
du Brésil devenue le temple de l’agro-industrie exportatrice et à qui la Commission européenne
souhaite faciliter, toujours plus, l’accès à notre marché à travers, notamment, le projet d’accord de libre-échange UE-MERCOSUR conclu en 2019, dont elle encourage aujourd’hui avec vigueur la ratification.

Un accord qui prévoit, entre autres concessions, l’octroi d’un quota supplémentaire d’un million de tonnes de maïs grain et de sorgho sans activation possible de droits de douane, de
mille tonnes de maïs doux et de nouveaux quotas à droits de douane nuls ou réduits concernant des débouchés à haute valeur ajoutée pour les producteurs de maïs français et européens tels que la volaille (180 000 tonnes) ou l’éthanol (650 000 tonnes).
Certaines exploitations au Mato Grosso atteignent jusqu’à 500 000 hectares, soit la superficie d’un département français moyen !
Ces « agro-holdings » du Mato Grosso, qui cultivent du maïs dit « safrinha » à contre-saison, après la récolte de soja sur des terres généralement issues de la déforestation, s’opposent en tous points à la production de maïs en France.
Par leur taille, d’abord : les plus grandes exploitations exportatrices atteignent jusqu’à 500 000 hectares, soit la superficie d’un département moyen français ! Par leurs pratiques, ensuite :
La quasi-totalité du maïs planté y est OGM et les producteurs recourent massivement à des produits phytosanitaires basés sur des substances actives strictement interdites en France et/ou en Europe, parfois depuis de très nombreuses années.

 

 

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