L’histoire de la pêche française est un témoignage de résilience, de solidarité et d’innovation. Une histoire de femmes et d’hommes de métier et de passion, qui animent l’art culinaire à la française avec grandeur et détermination. Aujourd’hui, cette même filière se trouve à un carrefour critique, et le gouvernement choisit de se défausser de ses responsabilités.
 
Un abandon réaffirmé par le Secrétaire d’État à la Mer au cours des dernières Assises de la Pêche, dont le discours « rassuriste » avait davantage l’allure d’un coup de communication destiné à la presse que de solutions pertinentes et réalistes. La filière dénonce aujourd’hui les effets d’annonces et les approximations, laissant croire que des solutions ont été proposées et que l’échec de la filière ne serait que de la responsabilité des structures professionnelles :
 

  • Réduction de 13 centimes à la pompe : Cette mesure soulève plusieurs préoccupations opérationnelles. Le biocarburant est plus cher, moins efficace (-20 % de rendement !) que le gasoil pêche et occasionnerait une baisse de puissance des navires. La distribution de ce carburant vert nécessitera par ailleurs des investissements à terre, ne permettant pas d’apporter une solution rapide à la situation actuelle. Enfin, quelle solution pour les navires s’approvisionnant auprès d’autres opérateurs que TOTAL ?
  • Taxe éolienne de 450 millions d’euros : La taxe éolienne captée par l’État auprès des exploitants de parcs, concernant les éoliennes au-delà des 12 milles nautiques, ne sera pas mobilisable à court terme, aucun parc n’étant construit à ce jour, et l’affectation de cette redevance n’étant par ailleurs pas définie. Concernant les parcs situés dans la zone des 12 milles, l’affectation de la redevance est déjà définie et son utilisation contrainte par les règles communautaires. Les sommes perçues ne seront donc pas utilisables pour répondre à la problématique du coût du carburant.
  • Pied de facture : Si cette proposition vise à compenser les coûts du carburant, elle ne concernerait que les produits pêchés par les navires français et aurait pour conséquence directe d’augmenter le coût de ces produits, diminuant ainsi les marges, déjà très faibles, des entreprises de l’aval, rendant ces produits moins compétitifs face aux importations, tout en augmentant le prix pour le consommateur. Une telle mesure contribuerait donc à les priver de produits dont les atouts « santé » ne sont pourtant plus à démontrer.
  • Contribution des Grandes et Moyennes Surfaces (GMS) : La GMS contribue à France Filière Pêche depuis 12 ans déjà. Cet engagement, prolongé pour les années à venir, permet des avancées concrètes pour la filière : meilleure connaissance de la ressource, limitation de la consommation d’énergie, amélioration de la sélectivité des engins de pêche… Il n’est en revanche pas de la responsabilité des enseignes d’apporter des solutions au coût élevé de l’énergie, qu’elles supportent également de leur côté, comme toutes les entreprises de l’aval.
  • Le Contrat Stratégique de Filière (CSF) : Contrairement à ce qui a été dit, le contrat de filière n’est pas prêt à être signé. Une telle annonce, au regard des enjeux de filière et de l’importance d’embarquer tous les maillons dans ces échanges, ne peut que susciter des difficultés. C’est un point que le Secrétaire d’État connaissait, ayant été informé par FFP et le CNPMEM début septembre. La raison d’être de ce contrat est par ailleurs de proposer des actions collectives, de long-terme.

Aucune des mesures annoncées par le Secrétaire d’État ne permet donc de répondre à l’urgence à laquelle la filière fait face, ou sont même, pour certaines, irréalisables. Le Secrétaire d’État dit vouloir avancer « ensemble avec exigence ». Nous ne pouvons qu’être d’accord avec lui, mais force est de constater qu’il n’applique pas à ses propres propositions l’exigence qu’il attend des structures professionnelles.
 
Il est temps que l’État renouvelle son engagement envers la filière pêche française, non par de simples promesses, mais par des actions concrètes et immédiates. Nous attendons un soutien réel et adapté à la situation, comme cela avait été promis par Madame la Première Ministre Elisabeth Borne en avril dernier. Nous en appelons à votre sens de l’engagement public, à votre devoir envers une filière qui, malgré les vents contraires, continue d’œuvrer pour offrir aux consommateurs français des produits sains et de qualité. Il en va aussi de notre souveraineté alimentaire, dont nous mesurons aujourd’hui plus que jamais l’importance.
 
Avec tout le respect que nous vous devons,
 
Frédéric Toulliou,
Président de France Filière Pêche et l’ensemble des acteurs de la filière.

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