La plantation forestière est un des leviers pour atténuer le changement climatique. L’origine des graines est cruciale pour optimiser le succès de la plantation des arbres et leur adaptation aux climats futurs. INRAE et l’ONF ont mené une vaste étude pendant plus de 30 ans à partir d’une collection d’une centaine de populations1* de chênes sessiles en provenance de toute l’Europe et réparties sur quatre sites expérimentaux en France pour identifier les meilleures sources de graines de cette espèce.
Leurs résultats, publiés dans Annals of forest science, montrent que ce sont les populations d’arbres provenant de régions ayant connu une longue tradition de sylviculture qui ont la meilleure combinaison de caractères écologiques et sylvicoles (survie, croissance, forme, adaptation aux variations climatiques). Les scientifiques recommandent d’utiliser une trentaine de sources de graines pour la plantation de chênes sessiles en France, réunissant diversité et adaptation nécessaires pour répondre à l’évolution climatique.
La sécheresse de 1976, qui correspond à un fort épisode qui a affecté la France et une partie de l’Europe entre l’automne 1975 et l’été 1976, a eu pour conséquence une hausse de la mortalité des arbres forestiers, notamment des chênes pédonculés. Ces dépérissements avaient suscité des recherches sur l’adaptation des chênes en général et notamment du chêne sessile, qui demeure l’espèce feuillue la plus plantée en France.
L’ONF et INRAE ont joint leurs efforts et réuni une collection de 110 populations de chênes sessiles en provenance de France (70 populations) et d’Europe (40 populations) sur quatre sites expérimentaux situés dans les départements de la Sarthe, du Cher, de la Nièvre et de la Moselle. Durant trente ans, les scientifiques ont étudié l’évolution des caractères d’intérêt de ces chênes (survie, croissance, forme, adaptation aux variations climatiques) et leur variabilité génétique. L’objectif était d’identifier les meilleures sources de graines pour la plantation de chênes sessiles capables de s’adapter aux climats futurs.
De manière surprenante, l’équipe de recherche a découvert que les populations de chênes présentant des caractères et des variations génétiques similaires ne se regroupaient pas selon les 19 zones géographiques d’origine des chênes sessiles, zones définies par leur homogénéité climatique (dénommées de « régions de provenance »). En revanche, l’étude montre les effets de la sylviculture sur l’organisation et la variation des caractères présentés par les chênes. Ainsi, les chênes présentant le meilleur compromis entre survie, croissance, adaptation aux variations climatiques et forme de l’arbre provenaient de régions ayant connu une longue tradition de sylviculture, remontant parfois jusqu’au Moyen-Age, comme le Bourbonnais, le Berry et le Bassin de la Loire. En effet dans ces régions, les arbres ont été sélectionnés par l’action de l’homme sur plusieurs générations pour ces caractères.
Les scientifiques en tirent plusieurs recommandations pour assurerle succès des plantations de chênes sessiles contribuant à une adaptation des forêts aux conditions climatiques futures. Ils ont identifié 34 populations de chênes, présentant de bonnes combinaisons de caractères, comme sources de graines
1 Population d’arbres : une population d’une espèce d’arbres correspond à un groupe d’arbres provenant d’une même région et ayant grandis dans un même environnement (sol, climat, gestion forestière…).
Ils soulignent également l’importance de mélanger les sources de graines afin de maintenir la diversité génétique des plantations, essentielle pour l’adaptation au changement climatique.
Références
Quentin Girard, Alexis Ducousso, Clothilde Boubée, Jean-Marc Louvet, Patrick Reynet, Brigitte Musch, Antoine Kremer, Provenance variation and seed sourcing for Sessile oak (Quercus petraea (Matt.) Liebl.) in France, Annals of Forest Science