Par Collectif national Stop CETA – Mercosur
En pleine mobilisations agricoles un peu partout en Europe, et notamment en France, les eurodéputés votent majoritairement en faveur des accords de libéralisation du commerce UE-Chili et UE-Kenya qui vont contribuer à importer toujours plus de produits agricoles de l’autre bout de la planète sans garantie d’être alignés sur la législation qui encadre la production de produits agricoles en UE.
Un vote en séance plénière du Parlement européen aura lieu en février 2024.
Après l’accord de libéralisation du commerce UE-Nouvelle-Zélande ratifié fin 2023 qui conduit à importer des produits agricoles de l’autre bout de la planète, les députés européens sont saisis de deux nouveaux accords : les accords avec le Chili et avec le Kénya sont en effet à l’ordre du jour de la Commission commerce international du Parlement européen ce mercredi 24 janvier, avant de l’être de celui du Parlement européen dans son ensemble à la fin du mois de février.
Dans deux déclarations distinctes, des dizaines d’organisations de la société civile – dont plus d’une vingtaine pour la France – appellent les eurodéputés à s’opposer à ces deux accords qui s’inscrivent dans un modèle de libéralisation du commerce (et de l’investissement) totalement obsolète, prolongeant des logiques d’appropriation des ressources naturelles au détriment des populations locales et de la protection de l’environnement. Veut-on vraiment, encore en 2023, augmenter les importations de biens, y compris agricoles, provenant de l’autre bout de la planète ?
Le collectif national Stop CETA-Mercosur, et ses partenaires, publient deux déclarations, avec leur liste de signataire respective :
- Plus de 100 organisations appellent les eurodéputés à voter NON à l’accord UE-Chili
- Lettre ouverte aux députés européens pour qu’ils votent contre l’accord UE-Kénya, endossée par 30 organisations
En résumé, l’accord UE-Chili :
- comporte des dispositions qui vont limiter les capacités du Chili à valoriser ses matières premières sur son territoire et qui vont accentuer la dépendance du Chili à l’exportation de matières premières et aux marchés mondiaux, plutôt que favoriser le développement d’une industrie et d’une économie locales créatrices d’emplois locaux.
- va augmenter les quotas d’importation sans droits de douane de produits agricoles (porc, le bœuf ou la viande ovine etc) : celui de la viande de volaille double pour atteindre les 38 000 tonnes. De nouveaux quotas sont créés pour les préparations de fruits (1000 tonnes), l’huile d’olive (11 000 tonnes) ou encore l’éthanol (2000 tonnes). L’accord ne prévoit aucune disposition qui impose aux produits agricoles chiliens d’être alignés sur la législation qui encadre la production de produits européens.
- Cet accord UE-Chili maintient également un dispositif de règlement des investissements investisseurs-État (ISDS en anglais), forme de justice parallèle accessible aux seuls investisseurs étrangers qui leur est généralement extrêmement avantageux, protégeant leurs intérêts au détriment de la capacité des États et des pouvoirs publics à réguler leurs activités et mener des politiques de transition socio-écologiques
- les entreprises européennes présentes dans le secteur des services vont très largement bénéficier de cet accord qui ouvre bon nombre de marchés publics chiliens (livraisons, télécommunications, transport maritime et services financiers) dans des conditions qui les favoriseront au détriment des entreprises locales.
- Plus généralement, les dispositions portant sur le climat sont faibles ou non contraignantes, et qui entrera nécessairement en contradiction avec les engagements de l’Accord de Paris.
En résumé, l’accord UE-Kénya :
- va principalement profiter aux investisseurs européens déjà présents dans les secteurs agricoles kenyans tournés vers l’exportation (fleurs, etc), enfermant encore davantage la région dans son rôle de fournisseur de matières premières à faible valeur ajoutée.
- va saper les efforts d’intégration régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est : comment imaginer qu’une union douanière telle que celle-ci ne soit pas profondément déstabilisée par un accord bilatéral qui va générer une pression concurrentielle dans l’ensemble de la CAE ?
- La stratégie de l’UE consistant à isoler certains pays africains dans l’espoir que d’autres pays de la région, mis ainsi sous pression, se joignent à de tels accords ne peut produire aucun résultat positif, si ce n’est renforcer une relation commerciale inégalitaire et insoutenable qui ne peut que générer une dépendance de forme néocoloniale à rebours de ce qu’il faudrait faire.
- Neuvième économie du continent africain, le Kenya exporte surtout des légumes, des fruits et des fleurs vers l’UE. A l’inverse, le pays importe des biens du secteur de la chimie et des machines européennes. Nul doute que l’on verra toujours plus de fleurs, fruits et légumes en provenance du Kénya sur les étals européens, produits dans des conditions loin d’être alignées sur la législation qui encadre la production de produits européens
Pour le collectif national Stop CETA-Mercosur, « les États-membres de l’UE et la Commission européenne continuent de vouloir insérer toujours plus d’activités, d’entreprises et d’emplois dans la mondialisation et la concurrence internationale, ce qui se fait au détriment de l’ambition climatique et écologique, de la protection des emplois et des conditions de travail, du maintien d’une agriculture paysanne de qualité et soutenable, ainsi que des promesses de relocalisation faites pendant la pandémie – ce n’est pourtant pas une fatalité et il est urgent d’emprunter une voie alternative vers la relocalisation écologique, sociale et solidaire ».
Le collectif Stop CETA-Mercosur et ses partenaires appellent à voter CONTRE la ratification de ces deux accords.